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1918-1939 : Vestige d'artillerie allemande découvert par l'ASAPE 14-18 !

C’était l'une des premières découvertes de l’année 2022 pour l’ASAPE 14-18… Cette fois ci - à même la surface - et non dans les profondeurs du sous-sol calcaire de l’Oise.

Signalée par un cultivateur, nous sommes intervenus pour la préservation d’une étrange plaque de fer remontée en surface, suite aux labours d’hiver.


Le décapage de la rouille par nos restaurateurs laisse apparaître des rivets, des axes de fixation et quelques impacts dus à des projectiles. Des traces de couleur verte, bien significatives de l’armée allemande sont également visibles sur des zones épargnées par la rouille. A ce stade, tout nous laisse à penser qu’il s’agit d’une plaque de blindage unique en son genre.

Une analyse minutieuse dans la documentation militaire allemande nous le confirmera par la suite.

L’ASAPE 14-18 replace alors cette découverte dans le contexte de l’organisation allemande du secteur lors de la Grande Guerre.

Les nombreuses traces rupestres découvertes à proximité du site, mentionnent les numéros des 𝗙eld 𝗔rtillerie 𝗥égiment (Régiment d’Artillerie de Campagne. Une ancienne carrière d’extraction de pierres souterraine est d’ailleurs baptisée par les Allemands « 𝕬𝖗𝖙𝖎𝖑𝖑𝖊𝖗𝖎𝖊 𝕳𝖔̈𝖍𝖑𝖊» (𝘊𝘢𝘳𝘳𝘪𝘦̀𝘳𝘦 𝘥𝘦 𝘭’𝘢𝘳𝘵𝘪𝘭𝘭𝘦𝘳𝘪𝘦).


Nos recherches révèlent que l’artillerie allemande y était bien stationnée de début Septembre 1914 à la mi-Mars 1917 ainsi que de Juin à Août 1918, lors de l’offensive dite « du printemps » ou « 𝘒𝘢𝘪𝘴𝘦𝘳𝘴𝘤𝘩𝘭𝘢𝘤𝘩𝘵 ». Nos recherches se portent alors sur le matériel d’artillerie allemande.


Après avoir étudié de nombreux documents, schémas et photographies, nous trouvons notre réponse dans un livre allemand édité en 1913 : "𝐴𝑛ℎ𝑎𝑛𝑔 𝑧𝑢𝑚 𝐸𝑥𝑒𝑟𝑧𝑖𝑒𝑟-𝑅𝑒𝑔𝑙𝑒𝑚𝑒𝑛𝑡 𝑓𝑢̈𝑟 𝑑𝑖𝑒 𝐹𝑒𝑙𝑑𝑎𝑟𝑡𝑖𝑙𝑙𝑒𝑟" (Annexe au règlement d'exercice pour l'artillerie de campagne). En analysant la composition d’une batterie (composée alors, en début de guerre, de 6 canons), nous découvrons l’existence d'une « voiture d'observatoire » ayant pour finalité l'installation d'un observatoire mobile. Chaque batterie avait alors sa propre voiture d’observation - soit 1 observatoire par groupe de 6 canons. Un système similaire semble exister également dans l’armée française et belge…



Sur les croquis d’époque, nous repérons notre plaque de blindage légère ! Elle correspond - en tout point - au vestige découvert par l’ASAPE 1418. Elle est juste pliée en son centre, sûrement à la suite des nombreux labours. Cette plaque se trouvait - à l’époque - à l’extrémité d’une échelle mobile de 2,50 m, permettant à l’observateur d’avoir un point de vue « élevé » et direct sur l’ennemi. La plaque découverte était censée permettre à l’observateur d’être à l’abri d’un tir ou d’éclats.

Cet ensemble peut se monter sur la voiture elle-même, permettant de gagner une hauteur supplémentaire d’1m50, soit 4m au total. Lorsque la voiture d’observation est située sur un point culminant, l’ensemble de l’observatoire mobile peut être installé à hauteur d’homme (sans échelle), comme le montrent certaines illustrations et photographies d’époque. Cette plaque comporte différentes charnières, afin d’y adapter des lunettes d’artillerie permettant les calculs des coordonnées. En 1914, le modèle le plus courant est les jumelles binoculaires de la marque C.P. GOERZ, modèle SF09.


C’est donc un vestige rare, du fait que ces observatoires mobiles n’ont trouvé leur utilité que dans les premiers mois de la Grande Guerre. La fixation du front ayant raison de leur utilisation.


En effet, dès la fin de guerre de mouvement, ces observatoires mobiles furent remplacés par des postes fixes comme ceux encore observés aujourd’hui dans les arbres observatoires ou bien encore des ballons captifs et bien sûr, l’aviation.

Les techniques de tirs et de communication évoluant, les observateurs artillerie sont de plus en plus éloignés des batteries de tirs et communiquent leurs ordres par téléphone. En 1914 l’observateur - un officier formé à cette tâche bien précise - devait se situer impérativement à proximité des canonniers afin d’ajuster les tirs et communiquer ses ordres à l’aide de fanions ! D’où la nécessité d’un poste d’observation mobile à proximité immédiate.


Ces éléments historiques au sujet des observatoires mobiles nous permettent d’affirmer que leurs utilisations - sur notre secteur - n’ont pu avoir lieu qu’au cours du mois de septembre 1914, juste avant la fixation du front (Octobre 1914).

Le FAR 24 (𝐻𝑜𝑙𝑠𝑡𝑒𝑖𝑛𝑖𝑠𝑐ℎ𝑒𝑠 𝐹𝑒𝑙𝑑-𝐴𝑟𝑡𝑖𝑙𝑙𝑒𝑟𝑖𝑒-𝑅𝑒𝑔𝑖𝑚𝑒𝑛𝑡 𝑁𝑟. 24) est identifié comme régiment d’artillerie de campagne ayant occupé cette position à l’endroit même où l’ASAPE a effectué cette découverte.


Officiellement et toujours - d’après les historiques - ce régiment arrive à cette position au soir du 12 Septembre 1914. Il est en appui des combats d’infanterie intenses, menés sur le secteur par L’IR75, L’IR76.

Chacune de leurs 6 batteries est alors équipée de 6 canons de type « 77𝑚𝑚 𝐹𝐾 96 𝑛.𝐴. » (n.A., neuer Art : nouveau modèle). En théorie, ces canons peuvent atteindre une cible à 8400m, cependant l’obus étant de faible poids, il était très difficile de contrôler l’effet des tirs à longue distance. L’utilisation courante veut donc que le 77mm FK96 n.A ne soit utilisé que pour des tirs inférieurs à 5000m.


Après avoir traversé la rivière Aisne à Attichy (60350), l’infanterie et l’artillerie allemande, notamment le FAR24 prend la direction du Nord, vers le village de Nampcel (60400) D’après les historiques allemands, cette avancée vers le Nord se déroule en milieu d’après-midi du 12 Septembre 1914. Bien que le plus gros des effectifs ait effectué ce mouvement à cette date, les Allemands sont déjà - depuis plus de 10 jours - bien plus loin que la plupart des historiques le prétendent.

Ils sont signalés, par des habitants de Moulin-Sous-Touvent et Puiseux, depuis le 1er Septembre au soir, dans les fermes situées à quelques centaines de mètres du lieu de découverte de ce bouclier d’artillerie.

C’est un incident relaté dans l’historique du FAR24, en milieu d’après-midi du 12 septembre qui permet aux membres de l’ASAPE de comprendre la provenance de cette plaque d’observatoire d’artillerie… Les faits se déroulent pourtant à 6 kms (à vol d’oiseau) du lieu de la découverte de cette plaque d’observatoire d’artillerie…


Rappelons qu’ « 𝑜𝑓𝑓𝑖𝑐𝑖𝑒𝑙𝑙𝑒𝑚𝑒𝑛𝑡 » ce n’est qu’au soir du 12 septembre et sous une pluie battante que le gros de la troupe allemande atteindra le lieu de notre découverte…